Cette newsletter comporte deux parties. La première est consacrée à l’analyse de la décision du Conseil constitutionnel. La seconde est une ITW de Me Christian MEAR, Avocat au barreau de Rennes qui a traité avec brio ce contentieux.
Nous vous proposons d’exposer ici une situation particulière. En effet, certains couples mariés sont tenus de déposer deux déclarations distinctes et de comparer le patrimoine net de chacun (et non le cumul) au seuil d’un montant de 1 300 000 €.
Le Conseil constitutionnel a été saisi en mars 2020 par le Conseil d’État.
Le 2 ° du paragraphe II de l’article 156 du code général des impôts prévoit que, pour la détermination du revenu imposable à l’impôt sur le revenu, la contribution aux charges du mariage peut être déduite « lorsque son versement résulte d’une décision de justice et » à condition que les époux fassent l’objet d’une imposition séparée.
Le requérant soutenait que ces dispositions seraient contraires aux principes d’égalité devant la loi et devant les charges publiques. Elles introduiraient une différence de traitement injustifiée entre les contribuables qui versent une contribution aux charges du mariage selon que leur contribution est versée ou non en exécution d’une décision de justice puisque la contribution ne peut être déduite du revenu que dans le premier cas.
I. Analyse sur le fond
Selon l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit.
Les époux doivent, au titre de leurs droits et devoirs respectifs, contribuer aux charges du mariage. L’article 214 du code civil prévoit que, si les conventions matrimoniales ne règlent pas cette contribution, les époux contribuent à proportion de leurs facultés respectives. Si l’un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être judiciairement contraint par l’autre.
Le 2 ° du paragraphe II de l’article 156 du code général des impôts prévoit que cette contribution peut être déduite du revenu de celui qui la verse en exécution d’une décision de justice lorsque les époux font l’objet d’une imposition distincte. Ce faisant, les dispositions contestées instituent une différence de traitement entre les contribuables selon que leur contribution est versée ou non en exécution d’une décision de justice.
Or, d’une part, la décision de justice rendue dans ce cadre a pour objet soit de contraindre un des époux à s’acquitter de son obligation de contribuer aux charges du mariage, soit d’homologuer la convention par laquelle les époux se sont accordés sur le montant et les modalités de cette contribution. Ainsi, une telle décision de justice n’a ni pour objet ni nécessairement pour effet de garantir l’absence de toute optimisation fiscale. D’autre part, le simple fait qu’un contribuable s’acquitte spontanément de son obligation légale sans y avoir été contraint par une décision de justice ne permet pas de caractériser une telle optimisation.