I. Retour sur les fondamentaux
Lors de la mise en place d’une société holding par apport de titres, il est possible de bénéficier d’un différé d’imposition des plus-values réalisées à cette occasion.
Ce différé d’imposition prend selon les situations soit la forme d’un sursis d’imposition soit d’un report automatique d’imposition. (On ne traitera ici que l’hypothèse des apports de titres réalisés depuis le 14 novembre 2012).
A. Sursis ou report d’imposition
Les plus-values d’apports de titres à des sociétés non contrôlées par l’apporteur relèvent d’un régime de sursis d’imposition de plein droit (CGI art. 150-0 B).
En revanche, les plus-values d’apports de titres à des sociétés contrôlées par l’apporteur relèvent d’un régime de report d’imposition de plein droit (CGI art. 150-0 B ter).
La condition de contrôle est appréciée à la date de l’apport, en tenant compte des droits détenus par le contribuable à l’issue de celui-ci.
L’apporteur est considéré comme exerçant le contrôle de la société bénéficiaire de l’apport lorsqu’il remplit l’une des conditions suivantes :
- Il détient la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société considérée. Pour l’appréciation de cette condition, il est fait masse des droits de vote ou des droits dans les bénéfices de la société concernée détenus, directement ou indirectement, par le contribuable, son conjoint (ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité), leurs ascendants, leurs descendants et leurs frères et sœurs ;
- Il dispose seul de la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société considérée en vertu d’un accord avec d’autres associés ou actionnaires ;
- Il exerce en fait le pouvoir de décision.
B. Conséquences pratiques
Le point commun à ces régimes réside dans le fait que l’impôt n’est pas dû au jour de l’apport à holding. L’imposition est donc retardée. Il est donc important de ne pas faire l’amalgame entre report/sursis et exonération. Trop de chefs d’entreprise comprenne que l’apport permet d’exonérer la plus-value au bout de 3 années, il n’en est rien, la plus-value reste imposable jusqu’à son décès…
1. En cas de sursis d’imposition
L’opération est considérée comme présentant un caractère intercalaire et n’est donc pas prise en compte pour l’établissement de l’impôt sur le revenu au titre de l’année de l’échange des titres mais, lors de la cession ultérieure des titres reçus en échange, le gain réalisé est calculé selon les règles en vigueur au jour où il est mis fin au sursis :
- Le prix d’acquisition retenu pour le calcul de la plus-value sera alors la valeur originelle des titres apportés (peu importe la valeur d’apport) ;
- Le prix de cession sera celui des titres de la holding au jour de la cession ;
- La plus-value pourra, le cas échéant, bénéficier d’un abattement pour durée de détention, si cette possibilité est toujours offerte à la fin du sursis, le maintien de l’abattement renforcé de 85% n’est en rien assuré pour les années à venir ;
- La plus-value sera imposée selon le taux en vigueur à la fin du sursis, rien ne garantit le taux actuel de 12,8%, ou un taux marginal maximum de 45% (tout peut évoluer dans le temps).
La seule certitude en matière de sursis réside dans le prix d’acquisition pour déterminer la plus-value future.
2. En cas de report d’imposition
Il est important ici de distinguer la plus-value en report et la plus-value en report d’imposition.
- La plus-value en report consiste à figer la plus-value imposable selon les règles en vigueur au jour de l’apport à holding. Selon le cas, la plus-value en report est soit le montant brut (valeur d’apport diminuée du prix d’acquisition) soit le montant net diminué d’un abattement pour durée de détention si la loi en vigueur au jour de l’apport le permet. Si l’assiette imposable est figée, le taux d’imposition ne l’est pas. Dès lors cette plus-value en report fera l’objet d’une imposition au taux en vigueur au jour où il est mis fin au report.
- Le report d’imposition consiste à déterminer l’impôt dû selon les règles au jour de l’apport. Dès lors, la plus-value est déterminée selon les règles en vigueur au jour de l’apport ; de plus, l’impôt est déterminé selon le taux en vigueur au jour de l’apport également. Ainsi, un apport réalisé en 2023 pourra déterminer soit une plus-value sur une assiette brute avec un taux de 12,8% au titre de l’impôt sur le revenu, soit une plus-value nette d’abattement pour durée de détention avec le taux marginal d’imposition en vigueur du contribuable au jour de l’apport.
II. Le dispositif du sursis d’imposition : CGI. art. 150-0 B
En vertu de l’article 150-0 B du CGI, le régime du sursis d’imposition s’applique aux échanges avec soulte à condition que celle-ci n’excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus. De plus, pour les opérations réalisées depuis le 1er janvier 2017, la plus-value est, à concurrence du montant de la soulte, imposée au titre de l’année de l’échange.
A. Neutralité fiscale lors de l’apport des titres
Le sursis d’imposition est applicable de plein droit sans que le contribuable ait à en faire la demande. L’opération d’échange est considérée comme une opération intercalaire. Au titre de l’année de l’échange, la plus-value ou la moins-value d’échange n’est pas constatée et ne fait l’objet d’aucune déclaration.
B. Perte du sursis
Lors de la cession ultérieure des titres reçus en échange, le gain net est calculé à partir du prix ou de la valeur d’acquisition des titres remis à l’échange. La même conséquence est constatée lorsque les titres reçus en échange sont ultérieurement rachetés, remboursés ou annulés. La plus-value imposable peut être réduite, le cas échéant, de l’abattement pour durée de détention, de droit commun ou renforcé ; pour cela, il est nécessaire qu’au jour où il est mis fin au sursis, ces abattements soient toujours en vigueur, rien n’est moins sûr ici.
C. Remise en cause du sursis due à une cession par la holding des titres apportés
Le sursis prend fin en cas de cession des titres par la société bénéficiaire de l’apport dans un délai court (aucune durée précise n’est prévue par la loi) à compter de l’apport, sauf réinvestissement économique d’une part significative (aucun pourcentage n’est prévu par la loi) du produit de la cession dans un délai raisonnable à compter de la cession (aucun délai précis n’est prévu par la loi).
D. Transformation du sursis en exonération
En cas de transmission des titres reçus en rémunération de l’apport pour cause de mort, ou entre vifs lorsque le donataire ne contrôle pas la société émettrice des titres transmis à l’issue de la donation, la transmission « purge » la plus-value en sursis qui est définitivement exonérée de toute imposition.
III. Le dispositif du report d’imposition automatique
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